Parlez-vous Viking ?

Posée comme ça, la question est quelque peu sollicitée et même carrément fantaisiste, puisqu'il n'existait pas une langue "Viking". En effet, comme l'écrivait Régis Boyer dans son ouvrage "Les Vikings", le terme "Viking" signifiait : "« On appelle Viking (Víkingr, en vieux norrois) un commerçant de longue date, particulièrement doué et remarquablement équipé pour cette activité, que la conjoncture a amené à se transformer en pillard ou en guerrier, là où c’était possible, lorsque c’était praticable, mais qui demeurera toujours quelqu’un d’appliqué à afla sér fjár (« acquérir des richesses »).
En revanche, il existait des parlers norrois. Je vous propose donc d'écouter ce poème eddique, appelé Atlakviða nous racontant la pesée des coeurs comparant un vaillant Viking à un couard.

http://www.youtube.com/watch?v=m6N0y-TZAT8

Ce texte est très prenant par ses sonorités gutturales et chantantes à la fois et sa proximité avec les langues germaniques et l'anglais modernes. Ses formes sont directes et élevées, concrètes et lyriques. Une construction difficile à reproduire en français, mais à laquelle je me suis efforcé tout au long de ma saga, notamment par l'usage du présent, les phrases courtes et la respiration.

Illustration : Musée des Temps Barbares - voir annonce à la fin de l'article -
http://www.museedestempsbarbares.fr/fr/fetes-archeologiques/journees-vikings.html



Hrólf reprend la mer !
Par Pierre Efratas


Cher/e/s lecteurs/trices et ami/e/s,


Enfin, je réponds à vos nombreuses sollicitations par l’intermédiaire de ce blog consacré à la saga de Rollon. Vous pouvez cesser de me maudire (gentiment) ou de supputer (un peu moins gentiment ;-)) que je me suis endormi sur mes pages. Je vous rassure : la deuxième partie est totalement écrite et prête à l'édition, et la troisième écrite pour plus de la moitié.
Mais alors, me direz-vous, pourquoi, mais pourquoi la deuxième partie n’est-elle pas parue ! Tout simplement parce que « Cheminements », l’éditeur de la première partie et moi sommes en discussion depuis quelques mois et que depuis peu, cette maison est officiellement en redressement judiciaire. A présent, nanti de ces trésors que représentent votre amitié, votre intérêt renouvelé, votre présence lors de mes conférences, et le prix Reine Mathilde qui a couronné la première partie, les longs bateaux vont reprendre leur navigation. C’est également l’occasion de reprendre notre dialogue !
Aussi, pour bien entamer cette nouvelle période et vous remercier de votre patience, j’aimerais vous parler plus précisément de la troisième et dernière partie en vous livrant quelques petits secrets d’écriture.

Le Vagabond, le Marcheur, le Géant
Comme vous le savez, puisque vous êtes de fervents lecteurs de ce blog, la deuxième partie des aventures de Hrólf (« Hrólf le Marcheur ») vous emmène sur les rives du Dal Riada d’abord, vers les rivages de Flandre et de Frise ensuite. Beaucoup de rebondissements et de surprises en perspective ! Quant à notre Gisbert de scalde, conteur de toute cette saga (ou plutôt : de l’essentiel - vous découvrirez bientôt pourquoi…), il est tombé éperdument amoureux de Brynhild, scalde et fille de devineresse – et elle le lui rend bien, chançard va. A lire ce qui précède, on pourrait croire que la création d’une petite cité, le lancement de plusieurs raids et la terrible bataille d’Ethandun contre les Saxons du roi Alfred ont enrichi ou stabilisé notre héros. Hélas, non ! Le destin n’est pas très aimable avec lui. Il est dit que, chaque fois qu’il bâtit quelque chose, tout s’écroule comme un château de cartes. Il lui faut alors tout reprendre à zéro.
De sorte que la troisième partie (« Hrólf le Géant – Rollon duc de Normandie ») s’ouvre sur une nouvelle errance qui va l’amener, lui, ses bateaux, son petit monde et sa désespérance sur les rives du Cotentin, partie intégrante de la Bretagne d’alors. Après une halte à Haka díki (lieu forifié appelé aujourd’hui La Hague), notre futur Rollon va pénétrer dans le Valland (la baie de Seine) pour se joindre à l’expédition de Sigfred sur Paris. Préparez-vous donc aux tumultes de la bataille et prenez garde ! car le siège sera très dur. Vous dire que cette aventure se termine positivement reviendrait sans doute à la parer de vertus qu’elle ne possède pas. Disons pour maintenir votre haleine en parfait état de fonctionnement que Hrólf va s’installer sur une petite île en amont de Rhuduborg (Rouen) et que, de là, sa puissance va grandir petit à petit sur la Basse Seine. Mais que serait la vie sans les battements du cœur, le parfum des doux baisers et le contact voluptueux des épidermes ? Notre héros va donc être frappé une nouvelle fois par la déesse Frigg : Poppa, bergère des îles lointaines dont Gulbrand, un chef de guerre, a fait son esclave, Poppa va lui rappeler que les joies de l’amour lui sont encore destinées. En effet, depuis la mort d’Asa et à la suite d’un mariage raté avec Esobell la Scot, Hrólf croit dur comme le métal de son épée Brekka que sa vie amoureuse était terminée – ah l’idiot, comme dirait Wandra la sorcière qui continue à planer sur son esprit - mais vous connaissez la soif d’absolu des jeunes héros ! Or donc, pour récupérer la belle Poppa aux noirs cheveux – et aux yeux bleus magnifiques, le fils de Rögnvald et de Hragnhild envoie trois émissaires en Ísland. Le trio formé de Brynhild, Gisbert et Fergheois va y connaître quelques péripéties très hasardeuses, mais je n’en dis pas plus…



Face aux Francs
Laissons l’amour et les voyages pour la bataille et la politique. Car cette fois, Hrólf Rögnvaldsson va affronter un ennemi très puissant : le roi des Francs, ou plutôt : les rois des Francs, parce que de complots en coteries, ça défile sur le trône ! Nous allons entrer subrepticement dans leurs palais (un bien grand mot pour des castrums des plus rustauds, mais soyons polis où il nous en coûterait), faire la connaissance de leurs conseillers et saisir mieux les raisons pour lesquelles Gisbert a quitté un jour sa Neustrie natale. Vous m’avez compris : il y a chez notre narrateur une envie de revanche qui va bientôt pouvoir trouver à s’épancher. Dès lors, laissons l’oiseau de votre imagination voler de page en page pour parvenir à ce jour de l’automne 911 où Hrólf-Rollon (Rollon est le nom que lui donnent les Francs) va conclure un traité avec le roi des Francs à Saint-Clair sur Epte. Cette fois, la prophétie de Wandra se réalise ! Sur les vertes rives, son protégé est devenu l’égal du plus puissant des rois. Bien entendu, aucun secret de cette négociation et de cette conclusion ne vous sera caché, je vous le promets. A cet instant, nous allons assister à la naissance d’un homme neuf, car Rollon devient Robert Ier jarl de Normandie et il se fait baptiser, se souvenant des avantages que ce geste a procuré jadis à Guthrum, roi des Danois… Alors, quoi, l’histoire est-elle déjà terminée ? Certainement pas ! Car maintenant, il va s’agir non seulement d’organiser la Neustrie, mais aussi de lutter contre les barons qui détestent ce Normand parvenu et notamment le comte de Flandre.
Je dois également vous avouer que de tristes événements vont se produire, il faudra en prendre votre parti, et que Brynhild et Gisbert auront un fils. C’est lui qui conclura cette saga. En sa compagnie, nous irons jusqu’en 933, date de la mort du premier duc de Normandie. Je vous proposerai alors d’entrer une dernière fois avec moi dans la cathédrale de Rouen, tombeau de ce bonhomme incroyable qui m’aura pris 1.500 pages, fait vivre tant d’aventures et donné tant de bonheurs !

Mener à bon port le bateau du récit
Ne croyez pas que les efforts et les retournements de destin soient réservés à notre Viking. J’ai aussi connu de ces moments d’abattement et d’enthousiasme alternés coïncidant avec les difficultés inhérentes non seulement à la construction d’un récit, mais aussi aux avanies du statut de romancier, métier difficile, ingrat, mais que je ne voudrais échanger contre aucun autre au monde ! Car comme le disait mon ami Armand Lecocq, « pour avancer en tant qu’artiste, c’est très simple, Pitou (Pitou est mon petit nom, on ne rit pas…) : tu chausses des patins à roulettes, tu te colles des ailes dans le dos et tu souffles ! » Foin de pathos, sachez qu’en écrivant cette dernière partie, j’ai pris un soin jaloux à appliquer la règle du naturel cher au Maître (normand) Gustave Flaubert. J’ai donc travaillé en trois fois. Une première pour jeter le récit sur le papier, comme ça, brut de décoffrage. Une deuxième pour reprendre, corriger, retravailler, muscler, réduire, renforcer de-ci de-là. Une troisième enfin (j’y suis !) pour fluidifier au maximum la narration sans tuer la musique du récit, pour retravailler les dialogues en leur conférant un maximum de densité et de réalité, et pour tirer à travers tout le récit les mailles d’un filet solide et cohérent. Je devrais aussi ajouter que j’ai puisé dans un grand corpus de légendes, sagas, eddas, chroniques et récits anciens et effectué des choix permettant de vous conduire d’une étape à l’autre comme à l’aide d’un fil d’Ariane. Cette saga peut se lire en continu comme en séquences libres (vous choisissez une séquence : celle-ci constitue un petit récit en tant que tel). A présent, je reprends mon travail et je vous envoie toutes mes amitiés. Que Gunnlöd vous abreuve d’hydromel poétique !


Le 16 mai 2009 (16/18 h) au Musée des Temps Barbares à Marle :
Lors des journées vikings organisées par ce musée très dynamique situé entre Saint-Quentin et Charleville-Mézières, j'aurai le plaisir de donner une conférence sur :
« Les invasions vikings, la formation de la Normandie et l'histoire de Rollon (Hrolf le Vagabond), fondateur du duché de Normandie »


Pour en savoir plus et découvrir des photos :
http://www.museedestempsbarbares.fr/fr/fetes-archeologiques/journees-vikings.html

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